À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’étude de Marc-André Gauthier, « L’endettement des familles québécoises : une comparaison Québec, Ontario, Canada » publiée en 2015 dans le bulletin « Données sociodémographiques en bref », 19 :2, p. 1-10.

  • Faits saillants

  • La dette globale des familles québécoises a doublé entre 1999 et 2012, passant de 109 à 248 milliards de dollars.
  • Sept ménages sur dix cumulent des dettes. L’hypothèque est la principale source d’endettement.
  • La valeur totale des hypothèques contractées est passée de 85 milliards de dollars en 1999 à 185 milliards en 2002.

La crise économique mondiale de 2008 a fait brutalement prendre conscience des problèmes que pose l’endettement des familles. Bien que le Canada n’ait pas été aussi durement touché que d’autres pays occidentaux, la Banque du Canada estime que « l’endettement élevé des ménages représente une des principales vulnérabilités de l’économie canadienne ». D’ailleurs, la proportion des dettes sur le revenu après impôt atteint depuis 2012 des proportions comparables à celles des États-Unis avant la crise de 2008… Portrait de la situation.

Payer l’hypothèque

Les données de cette étude, issues de l’Enquête sur la sécurité financière de 2012, indiquent une augmentation des dettes chez les familles québécoises. Entre 1999 et 2012, « le montant total des dettes est passé de 109 à 248 milliards de dollars, ce qui représente un accroissement de 127 % ».  Cette augmentation est équivalente à celle du Canada mais supérieure à celle de l’Ontario (109 %).

D’après l’auteur, l’hypothèque est « la composante pesant le plus lourdement » dans la dette des familles québécoises. Une hypothèque est un prêt souvent associé à l’achat d’un bien immobilier ou d’une voiture. Le créancier a le droit de reprendre possession du bien si la dette n’est pas remboursée selon les termes convenus. Le Québec « a connu une forte activité immobilière (…) au cours des années 2000 », ce qui explique l’augmentation du nombre d’hypothèques. La valeur totale des hypothèques contractées est passée de 85 milliards de dollars en 1999 à 185 milliards en 2002.

Il est intéressant de noter que les dettes liées au crédit à la consommation (par exemple, les achats par carte de crédit) « [ont connu], en proportion, une augmentation beaucoup plus importante que pour les hypothèques ». Entre 1999 et 2012, la masse du crédit à la consommation a triplé au Québec.

Sept familles sur dix

L’auteur remarque également que le nombre de ménages québécois endettés est resté relativement stable entre 1999 et 2012 : « environ sept ménages sur dix affichent des dettes à leur bilan et le tiers doit assumer les coûts d’une hypothèque ». Cette dette a cependant presque doublé, passant de 35 100$ en 1999 à  69 200$ en 2012. De plus, « la hausse de l’endettement ne s’est pas réalisée d’une manière homogène dans l’ensemble de la population endettée ».

Afin de « mesurer l’importance relative de l’endettement », l’auteur utilise un ratio dette/actifs. Ainsi, « en 2012, le ratio dette/actifs se chiffre à près de 13 % chez l’ensemble des ménages québécois ». Cela signifie que pour chaque 100 $ d’avoirs, les familles contractent 13 $ de dette. D’après la littérature citée par l’auteur, cela les place dans « une zone de confort où l’endettement peut être géré convenablement ».

Les 35-44 ans sont de plus en plus endettés

Les moins de 35 ans sont les plus touchés par l’endettement. L’achat d’une première résidence, les dettes étudiantes et un revenu plus faible en début de carrière expliquent cette situation. Au Québec, ils cumulent en moyenne 32 $ de dettes pour chaque 100 $ d’avoirs. L’endettement des jeunes Québécois est cependant moins important que celui des Ontariens et des Canadiens en général (36 $ de dettes par tranche de 100 $). Il demeure aussi dans des proportions équivalentes à celles de 1999 (environ 30 $).

Parmi tous les groupes d’âge, seuls les 35-44 ans ont vu leur part de dette augmenter depuis 1999; elle est passée de 21% à 28% en 2012. Cette situation est préoccupante car si « ce groupe ne représente que 16 % des ménages du Québec, [ils cumulent néanmoins] le tiers de l’ensemble des dettes des ménages de la province ».

Enfin, de plus en plus de personnes âgées (65 ans et plus) ont des dettes. En 1999, 28 % d’entre eux étaient endettés contre 45 % en 2012.

Plus on est riche, moins on s’endette

Les ménages dont le revenu annuel est supérieur à 125 000 $ sont les moins endettés. Leur ratio d’endettement était d’environ 7 % en 2012, soit près de la moitié du ratio des familles qui déclarent moins de 125 000 $ de revenu après impôt.

Les familles Québécoises les plus pauvres (moins de 50 000 $ de revenu après impôt) cumulent 23 $ de dettes par tranche de 100 $ d’actifs. La situation de ces familles est meilleure qu’en Ontario où elles cumulent 39 $ de dettes. Le prix de l’immobiliser plus élevé en Ontario expliquerait en partie cette différence.

L’auteur conclue que « l’endettement des Québécois s’est effectivement accru au cours de la dernière décennie». La part de la dette dans les revenus des ménages québécois en 2012 est cependant restée équivalente à celle de 1999 (sauf pour les 35-44 ans).  L’auteur s’inquiète cependant de la progression rapide de l’endettement québécois, la part de la dette étant de plus en plus importante par rapport aux avoirs, « [jetant] une ombre sur les perspectives d’avenir »…