À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’étude de Dany Boulanger, François Larose, Naomi Grenier, Frédéric Saussez, Yves Couturier, « Making the unfamiliar familiar : social Representations of Teachers about Parental Engagement in an Intervention Program in Québec » publiée en 2014, dans Enfances, Familles, Générations, n°20, p. 109-127.

  • Faits saillants

  • Les enfants issus de milieux socio-économiques défavorisés sont plus à risque de décrochage scolaire.
  • Les parents de ces enfants s'investissent peu dans le cheminement scolaire de leurs enfants et les enseignants ont tendance à percevoir leur participation de façon ambiguë.
  • En modifiant les relations enseignants-parents et en valorisant les compétences parentales, on peut favoriser la réussite scolaire.

On le sait, les enfants issus de milieux défavorisés sont plus à risque de décrocher de l’école que les autres. La réussite scolaire dépend en grande partie de l’intérêt et du soutien des parents. Or, d’après la littérature, les parents issus de milieux populaires éprouvent des difficultés à s’investir dans le cheminement scolaire de leurs enfants. Par exemple, ils participent peu aux devoirs et aux activités de l’école. Ces difficultés sont en partie liées à l’image négative entretenue par les enseignants à l’égard des compétences parentales en matière scolaire.

Le programme « Famille, école, communauté, réussir ensemble » (FECRE) a été développé et mis en place en prenant en compte ce constat, et ainsi mieux favoriser la réussite scolaire de ces enfants. Vingt-quatre écoles du Québec ont participé au programme entre 2002 et 2009. Ce programme repose sur une approche globale qui mobilise tous les acteurs gravitant autour de l’enfant : ses parents, les enseignants, la communauté. L’objectif est de favoriser l’engagement des parents envers la réussite de leur enfant en les incitant à participer davantage à la vie scolaire  (activités scolaires et parascolaires, aide aux devoirs…). Comment? En valorisant leurs connaissances et leurs compétences. Pour y arriver, le programme tente d’identifier et de changer les représentations sociales entretenues par les enseignants à l’égard des parents, et ainsi initier de nouvelles pratiques et façons de faire plus égalitaires.

Une attitude ambiguë

D’après la littérature scientifique citée, les enseignants peuvent avoir une attitude ambiguë vis-à-vis de la participation parentale à l’école. Cet engagement est généralement perçu comme positif, sauf en ce qui a trait au soutien pédagogique, par exemple l’aide aux devoirs. Selon les auteurs, le fossé culturel et une relation hiérarchique entre ces parents et les enseignants (ces derniers appartenant à la classe moyenne) expliquerait en partie ces difficultés.

Bien que la participation parentale soit valorisée, elle satisfait rarement les attentes des enseignants, selon les études. Les parents issus des milieux populaires sont généralement considérés comme incompétents pour soutenir leur enfant dans leur cheminement scolaire. Les autres types de savoir, comme le sens commun, de même que leurs compétences socio-éducatives, sont peu valorisés. Ainsi, la transmission des connaissances se fait quasi exclusivement de l’école vers la famille et n’est jamais « co-construite ».

Les recherches montrent aussi que dans les milieux populaires, les parents désinvestissent très souvent l’école. Le fossé entre l’école et la famille se creuse et les parents deviennent inaptes à soutenir efficacement leur enfant dans l’acquisition des connaissances. Le risque d’échec scolaire est ainsi amplifié.

Parents-profs : on devrait dialoguer!

Les résultats issus de cette étude montrent que les enseignants participant au programme FECRE ont, de manière générale, une vision positive de l’engagement parental à l’école. Demander aux parents de participer et les aider à le faire sont des « objectifs désirables », selon eux. Les enseignants affirment faire des efforts en ce sens sans toutefois parvenir aux résultats souhaités.

En effet, selon les enseignants, même si les parents s’engagent sur le plan académique et manifestent de l’intérêt pour les apprentissages faits en classe, ils ne répondent pas adéquatement aux attentes; par exemple ils n’assistent pas assez souvent aux rencontres. Les enseignants pensent également que le désintérêt des parents issus de classes populaires par rapport à l’école est dû à leur manque de compétences et de connaissances.

Enfin, comme les enseignants estiment que l’engagement des parents à l’école est essentiel à la réussite de leurs enfants, ils les perçoivent comme des « alliés nécessaires ». Toutefois, d’après les auteurs, les parents ne sont pas associés de manière active aux stratégies de réussite scolaire. Ils sont plutôt considérés comme le support passif des enseignants dans la transmission du savoir à l’enfant.

Plus de stratégies gagnantes

Les chercheurs expliquent que ce programme a permis une diversification des stratégies permettant de favoriser l’engagement des parents à l’école. Par exemple, les enseignants ont été invités à personnaliser leurs relations avec les parents d’élèves. Ils les ont intégrés à la préparation et à l’organisation de diverses activités et ont manifesté de manière formelle et informelle une reconnaissance de leur engagement.

D’après l’étude, après la mise en place du programme FECRE, les parents ont montré un plus grand intérêt pour la réussite de leur enfant et ont participé davantage à la vie de l’école. Ce changement d’attitude a eu un impact positif sur les enfants. D’après les auteurs, ils manifestent maintenant un sentiment d’appartenance plus grand envers leur école.

L’école rassemble des mondes différents : celui des parents, des enseignants, des élèves… Le programme Famille, école, communauté, réussir ensemble tente d’articuler ces différentes dimensions pour le bénéfice des enfants en difficultés. Pour faire de l’école un lieu partagé, il faut surtout renoncer aux idées toute faites!