À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’article de Clarisse Bender-Tinguely, Pascale de Montigny Gauthier, Francine de Montigny et Denis Mellier, « Les grands-parents en périnatalité : étayage et place à trouver dans le berceau psychique familial », publié en 2020 dans Dialogue, n° 230, p. 19-41.

  • Faits saillants

  • Durant la grossesse et après la naissance, les grands-mères maternelles sont les premières sources de soutien pour plusieurs nouveaux parents.
  • Pour obtenir de l’aide ou des conseils après la naissance d’un premier enfant, les mères ont tendance à se tourner vers les grands-parents, alors que les pères cherchent plutôt du soutien auprès de leurs pairs (amis, fratrie, etc.).
  • Soutenir leurs enfants, mais aussi leurs parents vieillissants, alors qu’ils sont souvent encore en emploi : les grands-parents doivent s’adapter à leurs nouveaux rôles lors de la venue d’un nouveau bébé dans la famille.

Fraîchement retraités, voilà que Francine et Luc apprennent qu’ils deviendront grands-parents pour la première fois. Comblés de bonheur, ils ressentent toutefois une pointe d’appréhension : quelle sera leur place ? Comment apprivoiser leur nouveau statut ? Si la venue au monde d’un enfant représente un chamboulement pour les parents, c’est aussi vrai pour les grands-parents, qui doivent définir leur rôle et trouver leur juste place au sein de la famille qui s’agrandit. 

C’est ce que constate une équipe de recherche en sciences infirmières et en psychologie de l’Université du Québec en Outaouais et de l’Université de Bourgogne Franche-Comté. À l’aide des témoignages de 42 parents et grands-parents (10 pères, 16 mères, 10 grands-mères, 6 grands-pères) provenant de familles où le plus jeune enfant a moins de 6 mois, l’équipe explore la manière dont les grands-parents établissent leur nouveau rôle en fonction du désir des parents et du soutien qu’ils peuvent apporter à la famille. 

Inclure les grands-parents : un peu, beaucoup, pas du tout ? 

Nouvelles responsabilités, nouvelle routine, manque de sommeil : dire que les nouveaux parents traversent beaucoup de changements est un euphémisme ! Vers qui se tournent-ils pour obtenir du soutien ? Bien souvent, ce sont les grands-mères maternelles qui sont au premier plan pour leur offrir de l’aide pratique et émotionnelle.  

Certains parents partagent sans filtre leur vécu avec leurs propres parents, alors que d’autres préfèrent garder une certaine distance pour en pas se laisser « envahir ». 

Alors que les pères se montrent plus indépendants, les mères ont tendance à inclure davantage les grands-parents dans les évènements entourant la grossesse et les soins au bébé. Les pères se tournent plutôt vers leurs pairs (amis, fratrie, collègues, etc.) en cas de besoin. 

Parent c’est une chose, mais grand-parent ?

Soutenir leurs enfants, mais aussi leurs parents vieillissants, alors qu’ils sont souvent encore sur le marché du travail : les grands-parents d’aujourd’hui doivent s’adapter à la complexité des rôles qui leur sont assignés. Ils font partie de ce que l’on appelle la « génération sandwich », coincés entre les soins à prodiguer à leurs parents vieillissants et à leurs propres enfants. Ce nouveau statut leur rappelle qu’ils ne sont plus tout jeunes, mais pas encore tout à fait vieux.

Malgré tout, le passage du statut de parent à celui de grand-parent aide certaines personnes à mieux accepter leur vieillissement. C’est aussi l’occasion pour elles de faire le deuil de leur carrière professionnelle et de donner naissance à de nouveaux projets.  

Aider, sans empiéter

De quelle manière rendre service aux parents ? À quelle fréquence ? Difficile de trouver sa « juste place » sans empiéter sur celle des parents ! Si les grands-parents offrent leur soutien sans compter, les nouveaux parents ne l’apprécient que sous certaines conditions. Il doit être bien dosé entre l’aide pratique (ex. : tâches domestiques, préparation des repas, etc.), la présence physique, le soutien moral et les conseils adaptés. À mesure que l’enfant vieillit, le rôle des grands-parents est appelé à changer.   

Les grands-mères maternelles se sentent privilégiées d’être très présentes dans la vie du bébé. Le son de cloche est différent chez certains grands-pères, qui déplorent le peu d’espace qui leur est accordé dans les premières années.

Les grands-parents, délaissés par le droit de la famille ?

En apportant leur soutien à la famille en construction, les grands-parents font peu à peu le deuil de leur rôle de parent et parviennent, au fil du temps, à trouver leur juste place. Par l’aide et le soutien qu’ils apportent aux nouveaux parents, ils jouent un rôle central dans la sphère familiale. 

Malgré leur importance, ils sont pourtant délaissés par la réforme du droit de la famille. Selon l’Association des grands-parents du Québec (ADGPQ), la réforme du droit familial serait discriminatoire, puisqu’elle ouvre la porte à une diminution des contacts entre les grands-parents et leurs petits-enfants. Selon l’ADGPQ, le projet de loi remet le fardeau de la preuve sur le dos des grands-parents. Ils devront en effet démontrer au tribunal qu’il est dans le meilleur intérêt de l’enfant de garder contact avec eux, par exemple à la suite d’une séparation parentale. L’ADGPQ prévoit déposer un mémoire à la Commission parlementaire au cours de l’année 2022 afin de dénoncer ce projet de loi.