À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’article de Sylvie Morin, « Le soutien social : un vecteur de résilience incontournable pour les familles d’accueil québécoises », Chapitre dans Résilience et culture, culture de résilience, publié en 2018 par le Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire.

  • Faits saillants

  • Lorsque les services sociaux collaborent et reconnaissent l’apport des familles d’accueil dans le cheminement de l’enfant, les conditions sont favorables pour le placement.
  • Famille, amis, proches : un trio gagnant pour tenir le coup face aux incertitudes, au stress et aux questionnements qu’éprouvent les familles d’accueil.
  • Si les familles d’accueil constatent un manque de soutien de leurs proches ou des services sociaux, elles iront à la quête de services supplémentaires.

Devenir famille d’accueil, toute une décision! Le projet est emballant quand les proches embarquent : des grands-parents venant en renfort, des couples d’amis présents et attentifs, des intervenants, si rassurants et compréhensifs, qui laissent présager une collaboration clémente. Les conditions sont réunies pour que l’enfant hébergé temporairement puisse souffler et s’épanouir… du moins, si le soutien se maintient. Les familles d’accueil n’ont pas toutes accès au même réseau d’entraide, et certaines doivent déployer des efforts considérables pour obtenir du renfort, dans un climat où les services se font rares.

Sylvie Morin, professeure de psychologie à l’Université de Moncton, se questionne sur les conditions qui permettent aux familles d’accueil de passer par-dessus les défis du quotidien. En tout, treize mères de familles d’accueil lui racontent leurs expériences, mais aucun père ne répond à son appel. Pour la chercheuse, c’est le signe d’une division encore significative entre les deux membres du couple. Questionnaires et entrevues permettent aux mères de décrire un placement qui s’est bien déroulé et un autre plus difficile. La chercheuse constate que les intervenants de la DPJ sont des ressources précieuses pour ces mères, mais que la famille et les amis jouent aussi un rôle de premier plan.

Non pas une, mais plusieurs oreilles attentives

Ne devient pas famille d’accueil qui veut, encore moins si le couple se lance seul dans l’expérience! Plusieurs mères se montrent catégoriques : le soutien des intervenants de la protection de la jeunesse est primordial pour qu’un placement marche comme sur des roulettes. Sans écoute, le succès du placement peut être compromis. Une participante compare même ce travail entre famille et professionnels à un « orchestre » qui doit jouer en harmonie. Dans certains foyers, les professionnels sont les mêmes depuis des années.

« Ça fait 15 ans que je suis avec la même intervenante ressource. La stabilité, vous n’avez pas idée de ce que ça peut faire. On se connaît. […] Elle fait partie de ma vie là. »

– Une participante

Pour ces mères, garder un lien fort entre les services sociaux et leur foyer devient une façon pour les deux parties d’avancer dans la même direction. D’autant plus que les enfants qu’elles accueillent ont pour la plupart vécu des situations difficiles. Plusieurs jeunes se retrouvent avec des besoins spéciaux et, sans accompagnement, les familles n’ont pas forcément les compétences nécessaires pour y répondre adéquatement.

« La famille ne peut pas être aimante, sécuritaire et encadrante, si elle n’est pas en mesure de comprendre cet enfant-là. Et pour le comprendre, ça lui prend la formation, l’information, la confiance et le respect. »

– Une participante

Mais le soutien du centre jeunesse ne contribue pas seul au bien-être mental des parents d’accueil. Au-delà des individus, c’est une pléthore de services qui peut contribuer à rendre la tâche plus facile. Les mères soulèvent quelques exemples qui répondent à leurs besoins, comme l’accès à des garderies, le soutien psychologique pour les parents et les enfants, des services de répit, etc.

Compter sur sa parenté

« Faites-vous des amis parce que vous allez en avoir besoin. C’est vraiment un choix, il faut que tu amènes ta gang avec toi dans cette aventure-là. » Le message lancé par cette mère d’accueil est clair : le soutien des amis et de la famille est essentiel pour se lancer dans l’aventure.

Qui entre dans ce réseau « informel » que les participantes décrivent? Outre la conjointe ou le conjoint, qui font partie intégrante du projet familial, les répondantes mentionnent leurs propres enfants devenus adultes, leur famille élargie, comme les frères et sœurs, leurs propres parents, ainsi que les amis de la famille.

« J’imagine que si le conjoint n’avait pas été tout à fait d’accord ou que la famille n’avait pas été tout à fait d’accord, je ne pense pas que j’aurais fait ça aussi longtemps »

– Une participante

Comment peuvent-ils aider? Rien de bien compliqué : considérer l’enfant comme un membre à part entière de la famille! Une écoute attentionnée pour les parents d’accueil est aussi la bienvenue dans les moments plus difficiles, lorsque l’enfant doit quitter le foyer par exemple.

Avis de recherche : soutien supplémentaire

Qu’arrive-t-il si le soutien envers les familles d’accueil vient à manquer? Eh bien ces familles se lancent à la quête de ressources! Pour plusieurs mères, ce manque menacerait la réussite du placement. Elles apprécient cette aide pour passer au travers des différentes étapes, mais la sollicitent aussi dans leurs décisions et leurs interventions auprès de l’enfant.

« On n’est pas des saints miraculeux et c’est 24 heures par jour et c’est 7 jours par semaine et sans aide, on n’arrive pas. »

– Une participante

Plusieurs racontent avoir eu recours à des services professionnels autres, comme des psychologues ou des juristes, pour elles ou pour l’enfant, ou encore avoir demandé explicitement des conseils à des amis ou des proches pour les éclairer dans une situation. Le tout semble très normalisé : il n’y a aucune honte pour ces familles à chercher du soutien supplémentaire.

Entre échange et confidentialité

Et si les familles d’accueil pouvaient se rencontrer pour échanger sur leur vécu? L’idée plaît aux femmes interrogées, qui manifestent leur désir d’en connaître davantage sur les expériences des familles semblables à la leur. Cela permettrait de partager et de ventiler à propos de leurs expériences, croient-elles. Par contre, en l’absence de répondants masculins, il est impossible de connaître l’avis des pères sur la question, ou sur l’importance des proches en général.

C’est d’ailleurs ce que proposent les Associations Démocratiques des Ressources à l’Enfance du Québec (ADREQ) de différentes régions du Québec. Devant un besoin des familles d’accueil de se rencontrer et d’échanger, les ADREQ organisent aussi bien des formations que des rencontres sociales pour les familles, comme des cafés-causeries et des sorties à la cabane à sucre. Les familles peuvent en profiter pour échanger sur leur réalité et les problématiques qu’elles rencontrent, tout en maintenant la confidentialité du jeune qu’elles accueillent et de sa famille biologique, comme le recommande aussi la Fédération des familles d’accueil et ressources intermédiaires du Québec.