À propos de l'étude

Ce texte de vulgarisation résume l’étude de Francine Ducharme, « Prendre soin d’un parent âgé vulnérable, une réflexion sur le concept de «proche aidant » et de ses attributs », publiée en 2012 dans Les cahiers de l’année gérontologique, 74-78.

  • Faits saillants

  • La configuration des familles change : il y a de moins en moins de jeunes pour s’occuper de plus en plus de personnes âgées.
  • Les aidants prodiguent des soins souvent plus complexes qu’autrefois, et ce pendant de plus longues périodes de temps.
  • Les proches aidants sont devenus des partenaires d’intervention essentiels; il est donc important de reconnaître leurs besoins et de leur offrir les ressources nécessaires.

Prendre soin de ses parents âgés est souvent perçu comme allant de soi. Pas si simple, explique Francine Ducharme, dans un article paru récemment dans Les Cahiers de l’année gérontologique. Ducharme explore les facettes moins visibles de l’aide aux personnes vieillissantes, comme le fait que l’aidant peut, lui aussi, retirer certains bénéfices de la situation. Regard sur un phénomène qui touche de plus en plus de familles.

La famille avant tout

« La famille demeure encore la principale source de soutien des personnes âgées » (Ducharme, 2012 : 75)

La configuration des familles a beaucoup changé. Autrefois, plusieurs membres d’une même famille pouvaient se répartir les tâches pour prendre soin des aînés. Aujourd’hui, les familles sont plus restreintes et sont composées de plus de membres âgés. Conséquences? Une capacité de soutien réduite et une solidarité familiale sous pression.

De même, de plus en plus de familles québécoises ont une composante « internationale », c’est-à-dire qu’un ou plusieurs de leurs membres vivent hors du pays. La distance physique les empêche donc de participer activement au soutien de leurs proches âgés.

Contrairement à certaines idées véhiculées, les enfants adultes d’aujourd’hui prodiguent plus de soins que ceux d’autrefois, des soins souvent plus complexes, et ce pendant de plus longues périodes de temps. Il y a donc moins de personnes disponibles qui doivent offrir plus de soins.

Aider, c’est « naturel »…

Personne soutien, aidant naturel, aidant informel, aidant familial, accompagnant, soignant non professionnel… La façon de nommer les proches aidants — en mettant l’accent sur son aspect « naturel », « inné » et non-officiel — témoigne de l’« invisibilité » de leur contribution, selon Ducharme.

Pourtant, le proche aidant est devenu un rouage essentiel du système de la santé, et on lui demande maintenant d’assumer des soins complexes, des soins autrefois dispensés uniquement par des professionnels. La pression est forte; il est difficile pour le proche aidant de suspendre la relation d’aide sans crainte d’être jugé.

On parle beaucoup des aspects négatifs et contraignants du rôle d’aidant naturel. Pourtant, on observe aussi la présence de plusieurs avantages et bienfaits : création de nouveaux liens, développement de compétences, sens existentiel, etc.

« Les aidants qui prennent soin d’une personne de laquelle ils se sentent proches sur le plan affectif se consacrent davantage aux soins. » (Ducharme, 2012 : 76.)

Pour aider les aidants

La relation entre les aidants et les intervenants a beaucoup évolué au cours des dernières années. Les intervenants ont adapté leur approche et considèrent maintenant les aidants comme des partenaires. Les proches aidants connaissent bien l’état et les besoins de leurs parents; ils doivent avoir accès aux ressources nécessaires pour bien jouer leur rôle : infirmières à domicile, compensation financière pour les frais de transport et les frais médicaux, etc. Ainsi, il est essentiel de prendre en compte les besoins des aidants au même titre que ceux de leurs parents.

Prendre en compte les besoins des proches aidants

En effet, les aidants ont aussi souvent besoin d’aide pour eux-mêmes : soutien psychologique, soutien financier, aide administrative en prévision du décès, etc. Actuellement, des services sont offerts aux aidants de manière épisodique, mais cela n’est pas suffisant, selon Ducharme. Elle reconnait toutefois que la mise au point récente de grilles d’aide systématique, élaborées en collaboration avec des aidants, pourrait améliorer la situation des proches aidants.

Des interventions ciblées efficaces

Les besoins des aidants devraient faire l’objet d’interventions ciblées à différentes étapes, par exemple lors du diagnostic d’une maladie dégénérative du proche âgé, de la transition vers un autre milieu de vie, etc. Il est reconnu que ce type d’interventions a des effets positifs sur la santé et la qualité de vie des aidants. Par exemple, certaines interventions viseront le renforcement et l’élargissement, au-delà des liens familiaux, du réseau d’entraide.

Les systèmes de services intégrés permettent qu’un intervenant agisse comme pivot pour les besoins des proches aidants et de leurs parents vieillissants. Ainsi, les proches tissent des liens avec un seul professionnel qui connait l’historique de la maladie, plutôt qu’une relation superficielle avec une myriade d’intervenants qui changent constamment de patients.

Des politiques pour les aidants

Les aidants devraient avoir une place clairement définie dans les politiques de santé, mais aussi dans les politiques liés au travail et à la fiscalité. Il est difficile d’évaluer avec précision les coûts associés au rôle d’aidant  — absences au travail, revenus moindres, carrière qui stagne, frais des soins, etc. Et que dire des économies effectuées grâce à leur travail?

Dans la société québécoise actuelle, caractérisée par une population vieillissante, la question des soins aux aînés se pose comme un enjeu majeur. L’apport des proches aidants en est une composante essentielle. S’assurer que leur travail soit reconnu par le milieu de la santé et intégré à la relation de soin est un pas dans la bonne direction. Mais, comme le souligne l’auteure, beaucoup de chemin reste à parcourir afin de rendre leur contribution plus officielle qu’officieuse!